Votée le 6 mars 2024 et promulguée le 13 mars, la loi portant amnistie générale des actes de violence liés à la politique, survenus entre février 2021 et février 2024, continue de créer la polémique. Son éventuelle abrogation divise les juristes et même la classe politique.
Cette loi d’amnistie couvre « tous les faits susceptibles de revêtir la qualification d’infraction criminelle ou correctionnelle, commis entre le 1er février 2021 et le 25 février 2024, tant au Sénégal qu’à l’étranger, se rapportant à des manifestations ou ayant des motivations politiques, y compris celles faites par tous supports de communication, que leurs auteurs aient été jugés ou non ».
Depuis sa promulgation, elle suscite une vive controverse. Bien qu’elle ait été adoptée avec 95 députés pour, 49 contre et 2 abstentions, de nombreux critiques remettent en question sa légitimité. Certains plaident même pour son abrogation. Le parti au pouvoir, le Pastef, qui était dans l’opposition à l’époque, a toujours été contre cette loi. Ousmane Sonko, lors de la campagne électorale pour les législatives anticipées, avait promis son abrogation. Le Premier ministre a souligné que « ces victimes ne peuvent pas être oubliées » et a affirmé que l’abrogation de la loi d’amnistie ferait partie des premières décisions après avoir conquis une majorité écrasante à l’Assemblée nationale.
Le débat a été ravivé la semaine dernière par El Malick Ndiaye, récemment nommé président de l’Assemblée nationale, qui avait préconisé une abrogation partielle. Il a déclaré : « Je ne suis, certes, pas juriste, mais une abrogation partielle serait mieux, car je pense que les crimes de sang ne doivent pas être amnistiés. De même, des gens qui n’ont absolument rien fait n’ont pas à être amnistiés. À ces gens-là, justice doit être rendue. »
Cependant, un magistrat anonyme a souligné que l’on ne peut pas parler d’abrogation partielle puisque l’on amnistie des faits et non des personnes. Il a ajouté que « si d’aventure on abroge la loi, ce sera des poursuites ciblées ».
Cette situation pose des questions difficiles sur la justice, la réconciliation et la gestion des violences politiques au Sénégal. Le débat autour de la loi d’amnistie continue d’alimenter les discussions, reflétant des tensions sous-jacentes au sein de la société sénégalaise.