L’INSTITUTION SAINTE JEANNE D’ARC DE DAKAR REFUSE D’ADMETTRE DES ÉLÈVES MUSULMANES VOILÉES, PERTURBANT LA RENTRÉE SCOLAIRE

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« La rentrée scolaire a été mouvementée hier à l’Institution Sainte Jeanne d’Arc de Dakar. La direction de cet établissement privé catholique a mis à exécution sa menace de ne pas accueillir les élèves voilées. Ces dernières ont été exclues des salles de classe, en dépit des mises en garde du ministère de l’Éducation », note le site Enquête Plus.

« Nous sommes huit élèves, toutes voilées, à n’avoir pas été admises dans l’école aujourd’hui. Nous avons d’abord été regroupées, puis nos parents ont été appelés pour qu’ils viennent nous chercher  » Une élève de terminale

La lycéenne fréquente depuis quatre ans l’établissement et portait jusqu’alors le voile à l’école. Mardi 3 septembre déjà, à l’accueil des élèves du primaire et du collège, les jeunes filles « voilées ont été appelées à se retirer dans une salle par les responsables de l’école, qui ont ensuite appelé les parents pour venir les rechercher », a rapporté l’un des parents d’élèves, Mohamed Rose, alors que deux policiers en uniforme surveillaient les entrées de l’école.

« Uniforme habituel »

La direction de l’Institution Sainte Jeanne d’Arc (ISJA) a envoyé un message aux parents dans lequel elle précise que la « Congrégation des Sœurs de Saint-Joseph de Cluny », dont elle dépend, a décidé que la « tenue autorisée (…) se composera, à partir de la rentrée de septembre 2019, de l’uniforme habituel, avec une tête découverte, aussi bien pour les filles que les garçons ». 

Tout en affirmant que l’école, créée en 1939, continue à accueillir des « personnes de toutes origines, cultures et croyances, sans exclusion », le texte demande « à tous les élèves, lorsqu’ils rentrent dans l’établissement, de respecter l’identité de l’école, en partie définie par la tenue ». Ce règlement est « conforme à ce qui a toujours été observé » dans les 57 pays où la congrégation a des établissements, notamment en Afrique de l’Ouest.

Familles aisées

Située à deux pas de la cathédrale de Dakar, dans le quartier historique et administratif, l’école, l’une des plus réputées du pays, est fréquentée par des familles aisées. Des religieuses catholiques qui y travaillent portent un voile. « Nous n’avons renvoyé aucun élève. Nous avons donné aux familles le règlement intérieur dès le mois de mai. Elles ont pu lire ce règlement, le signer et le valider avant les demandes d’inscription », a déclaré ce 4 septembre la proviseure de l’ISJA, Ryanna Tall.

« Pour les élèves dont nous avons constaté que la tenue n’était pas règlementaire, nous avons demandé aux familles de bien respecter le règlement intérieur qu’elles ont signé », a-t-elle ajouté. Le nombre d’élèves voilées non admises n’a pas été indiqué. L’établissement compte plus de 1700 élèves, garçons et filles.

Règlement intérieur

La direction « joue avec les mots », a regretté Jamal Abass, dont deux filles n’ont pas été admises. « Elle ne mentionne pas de manière précise l’interdiction du voile, mais dans les faits, c’est ça. »

En mai, s’exprimant à propos de ce règlement, le ministre de l’Éducation nationale, Mamadou Talla, avait évoqué des « actes discriminatoires d’ordre socio-culturels » et promis de « prendre toutes les dispositions pour mettre un terme à de telles situations ». 

« Pour le moment, on est dans la médiation, on veut d’abord privilégier cette voie. Dans tous les cas, l’école est pour tous, laïque et républicaine » Un responsable du ministère de l’Éducation

Voile intégral interdit au Sénégal

Le Sénégal compte plus de 90% de musulmans, adhérant pour la plupart à l’islam soufi, représenté par différentes confréries, qui vivent dans une grande concorde avec le reste de la population, principalement catholique. Les Sénégalaises sortent généralement dans la rue tête nue, coiffées d’une perruque à la mode ou d’un foulard aux couleurs éclatantes, assorties à leurs boubous ou robes traditionnelles.

Le hijab, qui ne laisse voir que l’ovale du visage et dont l’usage est courant dans le monde musulman, reste marginal dans le pays, où il est porté par des Sénégalaises aux pratiques religieuses rigoristes et par des étrangères.

Le gouvernement sénégalais a interdit en novembre 2015 le port du voile intégral dans l’espace public, pour prévenir les risques d’attentats.