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Tout d’abord, il faut se réjouir qu’un responsable en vue du régime, économiste de
surcroît, ait pris l’initiative de relever le défi d’un débat contradictoire sur une
question aussi essentielle que l’économie. Surtout lorsqu’il le fait dans des termes
civilisés et dans les limites de la courtoisie.
La tentative de réponse de monsieur Pape Malick Ndour, Coordonnateur National
du PRODAC, revêt beaucoup d’approximations, d’extrapolations, mais surtout
d’affirmations péremptoires qui ne cadrent pas avec les réalités, difficiles, que
vivent les Sénégalais. Ses réponses prouvent, à suffisance, que lui et les autres
responsables du régime ne vivent pas les conditions difficiles, voire les souffrances
du peuple. Cela est compréhensible, car tout le fardeau des politiques publiques
repose sur les masses populaires au profit de l’élite politico-administrative.
Il convient de replacer les choses dans leur contexte. Notre camarade, et tête de
liste nationale de la coalition AAR Sénégal, Thierno Alassane Sall, a voulu décrire
la situation grave dans laquelle vit l’économie sénégalaise pour attirer l’attention.
Quoi de plus juste que de se baser sur une note conjoncturelle dont le propre est
de donner une photographie du moment ? En plus des variations trimestrielles, la
DPEE donne un aperçu sur les glissements annuels enregistrés, ce qui offre la
possibilité de jeter un regard sur quatre (4) trimestres successifs, soit sur la
période d’une année.
Monsieur Ndour reconnaît que le « Sénégal a enregistré une réduction de 7,1 %
de son activité économique hors agriculture et sylviculture, en variation trimestrielle
» et récuse toute « contre-performance globale de ce secteur stratégique de notre
économie », comme l’a écrit le camarade Thierno Alassane Sall. Il nous parle de
progression « de l’état de l’économie comparé à la même période de 2021 ». Il
appuie son argumentaire sur des chiffres positifs en omettant de préciser qu’il les a
puisés dans les mêmes tableaux que ceux sur lesquels Thierno Alassane Sall s’est
basé pour tirer sur la sonnette d’alarme. Pourtant, il écrit, plus loin, sur la question
de l’emploi, qu’il ne fera « pas de commentaire sur son analyse puisque ces
affirmations ne s’éloignent pas trop de la réalité ». Une belle confirmation de ce
que Thierno Alassane Sall a écrit si l’on tient compte des relations de causes –
effets prouvées entre niveau d’activité économique et niveau d’emploi.
Tout en reconnaissant la véracité « d’une diminution substantielle des
financements retenus pour les acteurs du secteur (-13,7 %) », monsieur Ndour
appelle Thierno Alassane Sall à élargir son « champ d’analyse à tout le secteur
financier bénéficiant de conventions avec l’État ». Ce dernier n’a pris que l’exemple
de vallée du fleuve Sénégal pour illustrer « l’engagement factice de l’État » auprès
des organisations des producteurs. Cet exemple repose sur des statistiques
officielles et elles sont représentatives de la situation qui prévaut dans tout le pays
! Les appels de détresse des organisations de producteurs, relayés massivement,
et régulièrement, par les différents intervenants du monde rural sont entendus de
toutes parts, sauf de celle du gouvernement ! Si monsieur Ndour croit que la
situation qui prévaut sur la vallée du fleuve Sénégal est différente du reste du
Sénégal, qu’il nous fournisse les statistiques fiables qui la démontrent hors de tout
doute !
Les chiffres positifs, voire favorables au régime, triés sur le volet, ne sauraient
cacher les réalités du malaise profond que vivent le Sénégal et les Sénégalais. Les
présenter sans donner un portrait global et exhaustif, en taisant volontairement les
points négatifs, relève d’une stratégie de communication politique tout simplement.
Mais nos compatriotes ne sont pas dupes ! Ils savent, mieux que quiconque, les
souffrances qu’ils endurent et l’avenir peu prometteur qui se dessine à leur
horizon.
Je ne saurais terminer sans souligner et saluer le ton du débat adopté par
monsieur Pape Malick Ndour à la suite de celui du camarade Thierno Alassane
Sall. Nous pouvons nous opposer tout en restant respectueux l’un à l’égard de
l’autre. C’est cela la démocratie d’idées que nous ne cessons d’appeler de nos
vœux.
Cheikh Faye, Ph.D
Professeur agrégé UQAC – Canada
Membre du Cercle des cadres de la République des Valeurs/Réewum Ngor

