La présence militaire française au Sénégal est un sujet qui alimente une vive controverse, exacerbée par des déclarations contradictoires entre Emmanuel Macron, président de la République française, et Jean-Marie Bockel, son conseiller pour les affaires africaines. Ce débat s’est intensifié récemment, remettant en question la nature des relations franco-sénégalaises et la perception de la souveraineté sénégalaise. Lors d’une interview accordée à France 24, Jean-Marie Bockel a affirmé qu’aucune discussion formelle n’avait eu lieu entre les deux nations concernant la présence militaire française, ce qui contredit les propos du président Macron, qui a déclaré que des discussions avaient bien eu lieu avec les dirigeants africains, dont ceux du Sénégal.
Cette situation a pris une tournure particulièrement délicate lors de la 30ᵉ conférence des ambassadeurs, qui s’est tenue à l’Élysée les 6 et 7 janvier 2025. Emmanuel Macron a déclaré que la France avait eu des discussions sur le retrait des troupes françaises du continent africain, qualifiant cette annonce de « simple commodité et politesse ». Ces propos ont immédiatement suscité des réactions négatives, notamment celle du Premier ministre sénégalais, Ousmane Sonko, qui a fermement contesté l’affirmation du président français. Sonko a souligné que l’affirmation de Macron était « totalement erronée » et a insisté sur le fait qu’aucune négociation ou discussion formelle n’avait eu lieu entre la France et le Sénégal à ce sujet.
La réponse d’Ousmane Sonko met en lumière une préoccupation grandissante au sein du gouvernement sénégalais concernant la souveraineté nationale. Dans un contexte où de nombreux pays africains cherchent à affirmer leur indépendance vis-à-vis des anciennes puissances coloniales, les déclarations de Macron sont perçues comme une ingérence dans les affaires internes du Sénégal. La position du Premier ministre souligne l’importance d’une approche respectueuse de la souveraineté des nations africaines, un enjeu central dans le discours sur les relations franco-africaines. En déclarant que la décision de retirer les bases militaires relève uniquement de la volonté du Sénégal, Sonko renforce l’idée que le pays est capable de prendre ses propres décisions sans pression extérieure.
Jean-Marie Bockel, pour sa part, a tenté de clarifier la situation en soulignant que la seule interaction notable concernant la présence militaire française remonte à une rencontre entre Emmanuel Macron et le président sénégalais, Bassirou Diomaye Faye, en juin 2024. Au cours de cet entretien, Macron aurait évoqué cette question, mais la réponse du président sénégalais aurait été claire : « Laissez-nous le temps de la réflexion. » Cette réponse témoigne de la volonté du Sénégal de prendre le temps nécessaire pour évaluer la situation avant de prendre une décision. Bockel a également insisté sur le fait que la France ne cherche pas à exercer une pression pour maintenir une présence militaire, affirmant que toute décision devrait découler de discussions futures et d’une concertation mutuelle.
Cependant, les tensions persistantes entre les deux pays soulignent un fossé croissant dans leur perception respective. Le Sénégal, de par son histoire et sa culture, aspire à une relation équilibrée avec la France, basée sur le respect mutuel et l’égalité. Les récentes déclarations de Macron, perçues comme un manque de reconnaissance de cette dynamique, pourraient compromettre cette relation. Alors que de nombreux pays africains cherchent à redéfinir leurs relations avec leurs anciens colonisateurs, le Sénégal pourrait devenir un symbole de cette quête d’indépendance, défiant les anciennes normes et réclamant une voix plus forte dans les affaires qui le concernent.
La question de la présence militaire française au Sénégal ne se limite pas à un simple débat sur des troupes ou des bases. Elle touche à des enjeux profondément enracinés dans l’histoire coloniale, la souveraineté nationale et la manière dont les anciennes puissances coloniales interagissent avec leurs anciennes colonies. La nécessité d’un dialogue respectueux et d’une compréhension mutuelle est plus pressante que jamais, alors que le Sénégal et la France naviguent dans ces eaux complexes. La position du Sénégal est de plus en plus claire : le pays souhaite être traité comme un partenaire égal et non comme un ancien territoire sous tutelle.