CONTROVERSE JURIDICO-POLITIQUE SUR LA LOI D’AMNISTIE DE 2024 : LE RÔLE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

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Après la controverse juridico-politique sur « l’abrogabilité » ou la « révocabilité » de la loi sur l’amnistie de 2024, il convient de faire place au Juge constitutionnel qui pourra se prononcer bien avant ou juste après l’adoption de ladite loi. Il ne restera alors qu’à s’incliner devant le verdict des Sages.

1. La saisine du Conseil constitutionnel

Avant même que le vote de la loi ne soit envisagé, le Président de la République peut, après avoir mesuré l’intensité de la controverse juridique ainsi que la sensibilité politique et sociale de la question, saisir le Conseil pour avis. Cette démarche s’inscrit dans le cadre des dispositions de l’article 92 nouveau de la Constitution, qui prévoit en son alinéa 2 que « le Conseil constitutionnel peut être saisi par le Président de la République pour avis ».

Il est à noter qu’avec l’innovation de 2016, le Conseil constitutionnel a désormais une attribution consultative élargie, pouvant porter sur la juridicité de toute question politique et sociale. Son avis, qu’il soit favorable ou défavorable à l’abrogation ou à l’annulation de la loi, serait, selon l’article 24 de la loi organique 2016-23 du 14 juillet 2016 relative au Conseil constitutionnel, une décision qui s’impose à tous.

En effet, la Haute juridiction rend, en toutes matières, des décisions motivées qui ne sont susceptibles d’aucune voie de recours et s’imposent aux pouvoirs publics ainsi qu’à toutes les autorités administratives et juridictionnelles (article 92 de la Constitution).

2. Possibilité d’attaques post-vote

Si le Conseil n’est pas saisi en amont pour avis sur une question ou par le biais d’un avant-projet de texte, il est également possible que, après le vote de la loi par la nouvelle Assemblée nationale, les députés opposés à l’abrogation ou à l’annulation puissent attaquer la loi devant le Conseil constitutionnel, conformément à l’article 74 de la Constitution.

Encore une fois, la décision du Conseil, quelle qu’elle soit, s’imposera à tous. À cet égard, on peut rappeler sa décision du 12 février 2005 relative à une loi d’amnistie (loi Ezzan), qui a marqué les esprits.

*Ismaila Madior Fall*
Professeur de droit public
à l’Université Cheikh Anta Diop